Une opération majeure menée par l’Unesco : le déplacement du Temple de Philae

Aller visiter ce temple commence par une jolie promenade en bateau. Là encore, une vedette nous était réservée pour nous seuls. C’était le matin, la lumière bien que voilée était belle, avec un petit côté Grèce. Philae se situe ) proximité d’Assouan et a été très étudié par la grande égyptologue Christiane Desroches-Noblecourt : voici comment elle présentait ce temple dont elle s’est beaucoup occupée :

«Au milieu des eaux du Nil s’élève le plus fameux des sanctuaires d’Isis. Femme, épouse, mère, magicienne, salvatrice, la déesse se trouve au centre du grand mystère de la vie et de la mort qui aboutit à la résurrection. Pour reformer le corps de son époux assassiné, qu’elle entoura de bandelettes, elle confectionna la première momie. Le culte qu’on vouait à cette déesse-mère était associé au retour de la crue fertilisante qui faisait revivre la terre d’Égypte»

Ci dessous, une peinture de Philae en 1838 par David Roberts (avant que les couleurs ne soient abimées)


Une ile toute proche, Aguilkia, a été surélevée et on a transféré le Temple 12 m plus haut en 1990.

Le travail de reconstruction des 40 000 blocs de grès est absolument extraordinaire car absolument invisible. Et pourtant, je suis d'ordinaire très critique devant les mauvaises restaurations. Je n’ai pas encore compris comment un tel miracle a pu se produire - et il sera encore plus grand à Abou Simbel. J’ai d’ailleurs suggéré que des panneaux rappellent l’opération… et remercient les financeurs…

Si vous voulez en savoir plus, ces lignes de Plutarque remettent en perspective (certes à sa façon) l’histoire compliquée d’Isis, d’Osiris et de leur fils Horus… Je les ai empruntées à Passion égyptienne.

« Le Démiurge, hermaphrodite par essence, exprima et différencia les deux sexes qu’il totalisait en lui, en créant la lumière, Shou, et l’air, Tefnet. À leur tour, ces derniers firent apparaître le Ciel, Nout, et la terre, Geb, qui mirent au monde Osiris, Isis, Seth et Nephtys appelés à connaître les vicissitudes d’ici-bas. Le règne d’Osiris, incarnation du Bien, aurait pu se dérouler dans la plus parfaite harmonie sans les attaques répétées de son frère Seth, la Perturbation nécessaire, qui finit par mettre à mort Osiris en découpant son corps en seize morceaux jetés ensuite dans le Nil. Isis, la veuve éplorée d’Osiris, transformée momentanément en oiselle, survola le fleuve, repéra les fragments épars de son époux et les enterra successivement près du lieu de leur découverte. Pour désorienter son ennemi, en chaque lieu, elle reconstitua facticement le corps en sa totalité et le déposa dans un sarcophage. La jambe gauche fut inhumée dans l’île de Bigeh et c’est là qu’aux derniers temps de l’histoire pharaonique, on reconnut la vraie sépulture du Dieu près duquel un acacia - ou un tamaris - se mit à pousser.

L’essentiel de la légende tient dans ce qu’Osiris, qui enseigna aux hommes l’art de vivre, l’agriculture et qui, en compagnie de son épouse Isis, symbolisait le ménage idéal, n’avait pas laissé d’héritier. Il fallait donc que le Dieu fait homme survécût à son trépas pour assurer la continuité de la vie. Voilà pourquoi Isis la magicienne, avec l’aide de sa sœur Nephtys et en présence d’Anubis, façonna, avec les éléments rassemblés du corps martyrisé, la première momie. Or le membre viril avait été englouti dans le Nil par le poisson oxyrrhynque. Isis, la magicienne, se transforma à nouveau en oiselle et descendit doucement sur le corps d’Osiris, lui restituant pour quelques instants son pouvoir de procréer, et se fit féconder. Osiris devint alors, dans le monde souterrain, le Juge des trépassés, cependant qu’Isis, enceinte du futur héritier ainsi conçu, consacra tous ses soins à protéger sa gestation des manœuvres du Malin, pour mettre au monde Horus, l’enfant qui, en dépit des violentes contestations de Seth, régna sur les vivants à la place de son père.

Les représentations d’Isis et d’Horus sont aussi nombreuses que variées. C’est une des difficultés les plus importantes de la mythologie égyptienne que cette capacité des dieux à changer de personnage, tout du moins si on ne sait pas décoder les cartouches et autres signes descriptifs des sculptures.

L’ultime inscription hiéroglyphique connue date du 24 août 394 de notre ère ; elle émane du deuxième prophète d’Isis, Akhom, et se trouve justement à Philae où elle rappelle ces derniers païens fidèles à la Mère divine. Toute trace avait disparu vers 500 quand Justinien, implacable défenseur de l’orthodoxie, fit fermer les portes du temple.

Philae reçu la visite des officiers de Bonaparte qui ont gravé leurs noms dans la pierre. Avant eux de grands empereurs romains vinrent dans le Tempe : Hadrien et Trajan. Le premier fit graver quelques phrases et le second érigea un temple. A proximité se trouvent quantité s de sculptures évoquant la musique et la danse. On y voit distinctement des tambourin, des harpes et des flutes.

Par la suite, le site accueillit une église.

La visite commence par le fond du temple et remonte vers l’entrée principale.


 
Philae
Le Temple d’Isis